Date d'ajout : mardi 14 février 2017
par P. Louis-Marie
REVUE : CHEMINS VERS L’UNITÉ, 178
Si l'on n'est familier ni de l'herméneutique ni de Paul Ricœur, la lecture de ces dix-sept études, présentées par des universitaires de huit pays lors de deux récents colloques internationaux, pourra constituer une solide introduction à la pensée du grand philosophe français né en 1913. On commencera de préférence par le second colloque (Naples, 1993) dont les huit conférences introduisent à l'herméneutique, « doctrine de la compréhension et de l'interprétation des discours parlés et écrits » (p. 185), ainsi qu'à l'évolution de la pensée de Ricœur et de ses positions par rapport à ses devanciers (Husserl, Jaspers, Nabert, Heidegger …). On sera mieux armé alors pour aborder le premier colloque (Institut Catholique de Paris, 1992) qui s'est concentré sur Soi-même comme un autre publié par Ricœur en 1990. L'ouvrage n'a pas la prétention d'aborder tous les aspects de la pensée de Ricœur. Le nœud de l'ensemble est une réflexion sur le Soi (c'est-à-dire le Moi libéré de ses suffisances) et l'Autre, menée en interrogeant de vastes champs du discours et de l'agir humain : le récit et la poétique, le travail, l'histoire, l'éthique et la morale, la religion (conférence de Ricœur. Lui-même sur le discours religieux de la Bible). Au delà de l'alternative entre le sujet exalté (cogito cartésien) et le sujet humilié ou éclaté (philosophies du soupçon, sciences humaines) Ricœur sait retrouver un sujet humble, toujours remis en travail de lui-même par l'interpellation de l'Autre au plus intime de sa conscience. Le dialogue de Ricœur avec ses contemporains, en particulier Heidegger et Levinas, est nourri du sens du juste milieu hérité d'Aristote qui lui inspire aussi sa définition de l'éthique comme « visée de la vie bonne avec et pour autrui dans des institutions justes ».