Date d'ajout : mercredi 19 août 2015
par Dominique DINET
REVUE : REVUE MABILLON, n° 1, 10, 1999
Cet ouvrage reproduit les communications d'un colloque tenu à Pont-à-Mousson, en 1997, sur la place des Prémontrés en Lorraine. En réalité, les textes rassemblés ici débordent singulièrement ce cadre provincial en faisant alterner exemples précis et considérations plus générales sur l'histoire religieuse de cette province (avec notamment l'implantation des Prémontrés au XIIe siècle, par Michel Parisse, ou l'axe catholique lorrain au XVIIe, par Jean-Robert Armogathe) et celle de l'Ordre, ainsi au XVIe siècle (Léo Van Dijck) ou sur sa branche « réformée » de l'Antique Rigueur aux XVIIe et XVIIIe siècles (Xavier Lavagne d'Ortigue). De la sorte, on y trouve de précieuses mises au point, de solides références bibliographiques, des indications sur les sources, des cartes et, en annexes, une liste des abbés de Prémontré, des chapitres de l'Antique Rigueur, etc., bref, de très utiles matériaux pour une histoire de l'Ordre, complétant parfois les recueils généraux antérieurs.
Il y a donc une sorte de dialogue constant entre une vision d'ensemble et des situations locales : fondation de Sainte-Marie-au-Bois au XIIe siècle (Hubert Collin), introduction de la « réforme » à Septfontaines en Bassigny (Anne-Marie Couvret), ou l'étude de figures particulières, célèbres comme Nicolas Psaume (Bernard Ardura) et Servais de Lairuels (Dominique-Marie Dauzet), moins connues tels ces trois abbés d'Etival : Jean Frouart (Marie-Thérèse Fischer), Épiphane Louys (Jean·Marc Vaillant) et Charles-Louis Hugo (Monique Taillard).
Plutôt que de s'arrêter sur chacune des communications, on soulignera que la « réforme » lancée par Servais de Lairuels et sa difficile application (comme des entreprises similaires dans d'autres ordres, phénomène envisagé ici d'ailleurs) constituent les thèmes majeurs de ce colloque. Avec bonheur, on dépasse les arguments traditionnels, qui ne sont pas sans valeur, sur les méfaits de la commende, les résistances individuelles, pour envisager les interventions souvent maladroites des pouvoirs supérieurs, les risques de « schisme » etc. On pourrait sans doute aller plus loin encore en considérant davantage les problèmes du temporel, la nouveauté de la notion de congrégation, l'introduction de notions spirituelles extérieures à l'Ordre.
De même, il faut mentionner, pour ce travail comme pour toute autre enquête sur l'Ordre, la chance de disposer, au moins pour quelques abbayes, de recueils d'actes honnêtement recopiés au XVIIIe siècle, fiables et non sélectifs (des recoupements permettent de s'en rendre compte), qui sont de remarquables instruments d'histoire locale. Certains des chanoines réguliers, qui les avaient composés, s'en étaient d'ailleurs servis pour écrire des histoires manuscrites de la maison où ils se trouvaient, ainsi à Étival ou à Septfontaines en Bassigny.
Ayant utilisé de tels matériaux, les auteurs de ce colloque nous ont donc offert un livre de qualité sur l'ordre de Prémontré.