Date d'ajout : mardi 18 avril 2017
par Y. CONGAR
REVUE DES SCIENCES PHILOSOPHIQUES ET THÉOLOGIQUES, 64, 1980
Dans sa thèse, que nous avons présentée naguère ici même (62 (1978) 83-85), Claude BRESSOLETTE avait abondamment cité le texte que, très heureusement, il édite aujourd’hui intégralement en éclairant les moindres allusions par des notes précises et en situant d’abord ce cours dans la vie et l’œuvre de H. MARET, dans l’histoire politico-religieuse du XIXe siècle. Maret a été avec Lamennais et Lacordaire dans le combat de L’Avenir, puis le très actif directeur de L’Ère nouvelle : des titres significatifs. A la veille du coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte, il donne à la Sorbonne ce cours. C’est une option lucide et documentairement fondée pour la démocratie. Et pour une condition où l’Église agira, non par pouvoir et juridiction, mais par proposition de son message dans un climat de liberté : ce qu’on a parfois appelé « pouvoir directif ». Ainsi Maret devait déplaire à Pie IX non seulement par son gallicanisme modéré (souveraineté partagée par l’épiscopat), mais par son libéralisme politique ! On a souvent présenté la minorité de Vatican I comme l’avant-garde de Vatican II. De fait, Maret développe les bases théoriques de ce qui sera la Déclaration sur la liberté religieuse. Simplement, le concile a parlé de respect de la dignité de la personne humaine, là où Maret dit « par respect pour la religion, il [l’État] s’abstient de s‘immiscer dans les choses de l’âme ; il ne veut pas se placer entre l’âme et Dieu ; il se déclare incompétent ». Comment Maret, opposé au coup d’État du 2 décembre 1851 et à l’autoritarisme, s’est-il rallié au Second Empire jusqu’à devenir un conseiller de Napoléon III ? C’est pour poursuivre efficacement son propos d’influer dans le sens de ses idées par les nominations épiscopales et par une vitalité de la Faculté de théologie de la Sorbonne, dont il était le doyen. Il n’a connu qu’un succès bien modeste de son vivant, et le concile de Pie IX a dû être pour lui une dure épreuve, d’autant plus qu’il était sourd et suivait peu des débats que même les bien-entendants saisissaient difficilement. Nous sommes reconnaissants à Claude Bressolette et à l’Éditeur de nous avoir rendu accessible un texte de réelle valeur, car Maret a sérieusement raisonné et s’est convenablement documenté en histoire des idées et des institutions.