Date d'ajout : mardi 13 juin 2017
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BULLETIN CRITIQUE DU LIVRE FRANÇAIS, octobre 1973
Saint Sophronios est un personnage important à plus d'un titre. Né à Damas vers 550, de culture grecque et de sensibilité syrienne, devenu moine, ami de plusieurs auteurs chrétiens d'envergure comme Jean Moschus, il prit parti avec vigueur dans les luttes politico-religieuses du temps entre le monophysisme dominant en Syrie et en Égypte, le diphysisme « orthodoxe» et les essais de formules théologiques de compromis qu'on recherchait à Byzance. Il fut nommé patriarche de Jérusalem au début de 634, au moment même où commençaient les grandes invasions arabes et traita de la reddition de la ville sainte avec le calife Omar en 638. Il dut mourir l'année suivante. Un jeune théologien dominicain autrichien, Christoph von Schonborn, lui consacre un livre fort intéressant. Après une première partie sur le développement du monachisme palestinien au Ve et au VIe siècle, il discute avec une grande rigueur historique et critique de la biographie et de l'œuvre de Sophronios. La seconde moitié du livre est un tableau des thèses théologiques soutenues par le patriarche de Jérusalem tout au long de son œuvre, non pas systématiquement, mais de façon implicite et parfois lyrique. Il s'agit surtout du mode d'agir de la trinité et de la christologie. La relation des deux natures dans le Christ sert de modèle à l'effort du corps et de l'âme du chrétien pour devenir parfait comme le Père, donc être « divinisé ». L'auteur traite son sujet avec beaucoup de science et de finesse, en soulignant les liens de cette pensée avec l'esprit du monachisme oriental. Il nous semble seulement suivre un peu trop la tendance, devenue archaïque même chez les théologiens, à traiter les « hérésies » uniquement comme déviations qui supposent l'immoralité de leurs partisans.