Date d'ajout : vendredi 04 décembre 2015
par A. DARTIGUES
REVUE : BULLETIN DE LITTÉRATURE ECCLÉSIASTIQUE, juillet 2001
Déjà connu pour ses nombreux travaux sur Nietzsche, l'auteur nous livre ici un choix de textes brefs, la plupart déjà publiés comme articles dans plusieurs revues. Après l'usage provocant qu'on a fait de la pensée de Nietzsche dans les années 70 et la tendance actuelle à la situer dans le courant dit "post-moderne", nous voici invités à en faire une nouvelle lecture qui fasse droit à des aspects toujours méconnus et pourtant essentiels.
Deux postulats de l'interprétation traditionnelle de Nietzsche sont, en effet, ici mis en cause : que sa pensée relèverait du vitalisme et serait donc à considérer comme un irrationalisme ; que le rejet nietzschéen du christianisme ferait de cette pensée un pur athéisme au regard duquel la question du divin serait devenue insignifiante. Or, si Nietzsche reconnaît dans la science, telle qu'elle se déploie dans l'idéal positiviste, la même volonté de croyance et le même idéal ascétique que ceux de la religion, il n'en propose pas moins une "raison restaurée" et une nouvelle forme de connaissance consciente de ses limites et ouverte à l'abîme d'une réalité échappant à toute visée anthropocentrique. De même, si Nietzsche combat le christianisme comme un "ennemi d'égal à égal", ce n'est pas au nom d'un athéisme vulgaire mais d'une expérience qu'on pourrait qualifier de mystique et qui le met en "quête d'un Dieu non vengeur et d'une divinité aux pieds légers", celle à qui il donne le nom de Dionysos.
On lira aussi avec intérêt l'étude sur "Nietzsche et la noblesse du droit" selon laquelle Nietzsche propose, non un droit nouveau, mais une inspiration du droit par l'idéal de noblesse, et les indications pour une compréhension plus exacte du thème difficile de "l'éternel retour". Ces nouvelles propositions de lecture de Nietzsche, qui n'esquivent pas les obscurités et les ambiguïtés de sa pensée, sont venues à point nommé l'année même où l'on commémorait le centenaire de sa mort.