Date d'ajout : lundi 19 janvier 2009
par Martine Dulaey
REVUE DES SCIENCES RELIGIEUSES 96/4 (2008) 599-630
Le travail de Cr. BADILlTA, Métamorphoses de l'Antichrist chez les Pères de l'Eglise, traite de la question de l'Anté-(ou anti-)christ à partir d'Irénée (l'auteur auquel s'arrête généralement la bibliographie antérieure sur le sujet), et ce jusqu'au VIe s. Après un état de la question très complet qui analyse les différentes théories en présence, l'auteur examine l'idée que divers Pères de l'Eglise se font de l'antéchrist : pour Irénée, il est la personnification du mal total, et les hérétiques sont ses précurseurs ; avec Hippolyte, il devient un personnage autonome ; Victorin, Commodien, Lactance et Sulpice Sévère font tous écho à la légende du Nero redivivus, qui veut que le premier persécuteur des chrétiens, l'empereur Néron, soit aussi le dernier et revienne dans ce but à la fin des temps. Chez Origène, on a une vision spiritualisée de l'antéchrist : tout fidèle peut devenir un antéchrist ; cette interprétation démythisée se retrouve plus tard dans la Cité de Dieu d'Augustin.
L'intérêt du livre est de voir dans le thème de l'antéchrist, qui n'a pas cessé de hanter les imaginations en Occident, moins une légende dépassée qu'un mythe au sens fort du terme. une vision cosmique et anhistorique de l'affrontement et du mal, il substitue une vision historique : l'antéchrist est l'incarnation du mal absolu dans l'histoire. Le titre même de Métamorphoses n'a pas été choisi au hasard : selon l'auteur, en effet, il faut abandonner la vision d'un développement linéaire du mythe, depuis les éléments épars dans la Bible jusqu'à une forme considérée comme accomplie; il est relu dans les différentes circonstances historiques et se métamorphose en fonction du contexte.