Date d'ajout : mercredi 19 août 2015
par E. L.
REVUE : IRENION 1-4, 2, 1997
Il faut un courage certain pour entreprendre aujourd'hui l'édition des lettres d'Isidore de Péluse. Non seu1einent parce qu'à ce corpus épistolaire de deux mille lettres manque à première vue le contexte, c'est-à-dire la connaissance du destinataire, l'occasion qui a fait écrire la lettre, la date à laquelle chacune a été écrite, mais parce que maintenant encore l'authenticité de cette correspondance et même l'existence d'Isidore ont été mises en question, parfois par des gens sérieux. Il fallait donc reprendre entièrement ce que nous pouvons savoir du Pélusiote avant d'entreprendre une édition critique. P. E. a donc donné une monographie sur la personne de son héros et sur son œuvre. En fait, après des analyses minutieuses, un inventaire des destinataires des lettres et du milieu dont elles proviennent, il rejoint dans l'ensemble ce que la tradition nous avait transmis sur Isidore. Né à Péluse vers 355, après des études à Alexandrie, il a d'abord été sophiste dans sa ville. Il a fait ensuite un premier séjour monastique à Nitrie et aux Cellules où il a connu les milieux évagriens, l'œuvre des Cappadociens, et est devenu un admirateur de Jean Chrysostome. Il a mis ses talents de sophistes au service d'une exégèse remarquable de la sainte Ecriture. Revenu à Péluse, il entre dans le clergé de sa ville sous l'évêque Ammonios, puis la quitte définitivement sous l'évêque Eusèbe, pour s'adonner à la vie solitaire dans un monastère probablement à l'Est de Péluse. Il meurt vers 435/440. Remarquons qu'en établissant ce curriculum P. É. est très prudent dans ce qu'il avance. Il opte pour les solutions qui lui paraissent les plus vraisemblables en se fondant rigoureusement sur sa documentation. Il est, par contre, catégorique pour rejeter les hypothèses aventurées qui ont mis en question Isidore et son œuvre. Quant aux Acémètes de Constantinople, s'ils ont soigneusement retranscrit le corpus de la correspondance isidorienne, ils ne l'ont pas créé. Non, cette correspondance circulait déjà avant eux et la tradition syriaque apporte un témoignage précieux parce qu'indépendant. L'ouvrage de P. É. est articulé en deux parties: la première décrit longuement le milieu tel qu'il ressort des lettres, mais aussi tel que nous le connaissons par la documentation externe: cadre géographique et historique, milieu politique, municipal, ecclésiastique, monastique. Cette première partie conclut que le corpus des lettres a été rassemblé en Augustamnique 1re par des moines disciples d'Isidore. C'est à partir de là que la seconde partie reconstitue la vie d'Isidore. Tout l'ouvrage paraît très solidement structuré et emporte la conviction. Différents index rendent très profitable la consultation de ce travail qui renouvelle notre connaissance d'Isidore.
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