Date d'ajout : dimanche 29 mars 2009
par D. MISONNE
REVUE BÉNÉDICTINE t. 117 décembre 2007
Pendant dix siècles, du dèbut du IVe au milieu du XIIIe siècle, de Constantin à saint Louis, l'auteur suit la « politique des reliques » menée par les souverains et les princes de Byzance et d'Occident. Après la découverte (inventio) de la croix du Christ par la mère de Constantin, la croix devint l'emblème des armées du basileus, et les empereurs byzantins accaparèrent rapidement la relique dans leur palais de Constantinople pour s'en réserver la force miraculeuse. Dix siècles plus tard, Louis IX acquiert la couronne d'épines pour laquelle il fait ériger la Sainte-Chapelle au cœur même de son palais, manifestant clairement son intention d'en doter le pouvoir royal. Ainsi donc les reliques, objets de culte, furent aussi objets de pouvoir. Il est bien difficile de tracer une ligne de partage entre le politique et le religieux. Tout est encore mêlé à cette époque. Comme le dit J.-C. Schmitt, les reliques jouent un rôle essentiel de médiation entre ces deux formes de pouvoir.
Le copieux dossier présenté ici par Edina Bozoky, résultat des recherches qu'elle mène depuis plusieurs années, met bien en lumière les enjeux politiques que représentaient la possession et le contrôle des reliques. À juste titre, elle attire aussi notre attention sur le fait que les enjeux de légitimation autour des reliques s'expriment non seulement par des pratiques (translation, exaltation etc.) mais aussi par des discours (récits, légendes liturgiques, chroniques etc.) qui ont parfois autant d'importance politique que les faits mêmes qu'ils rapportent. À ce propos elle note judicieusement : « Les auteurs de ces écrits élaborent des légendes de plus en plus amplifiées, mais encore ils prêtent ainsi aux faits passés des motivations qui correspondent aux préoccupations de l'Église ou du pouvoir politique en leur propre temps. » Il s'agit donc de « décoder» ces textes pour en dégager le message caché.