Date d'ajout : dimanche 21 février 2016
par Pierre-Jean LABARRI�RE
REVUE : ÉTUDES 138/1997
D'apparence incongru pour le mysticisme autant que pour le bovarysme, ce livre inattendu et suggestif détonnera, de prime abord, dans l'avalanche d'ouvrages ou pieux ou savants qui accompagnent la nomination de la « petite Thérèse » comme « docteur de l'Église ». Confronter ainsi deux destins de femmes, fiction et réalité confondues, montre pourtant comment des réponses bien différentes peuvent s'enraciner dans un même contexte d'histoire, dans une même psychologie frustrée et douloureuse. Michelle Perrot, en préface à ce livre, légitime avec intelligence l'essai de Micheline Hermine en parlant de « destins identiques dans leur disparité apparente » : « l'une et l'autre, la pécheresse et la sainte, rêvent d'amour fou, fusionnel, ineffable » ; « dans ce domaine de l'amour et du désir, Emma et Thérèse se ressemblent comme deux sœurs aux longues chevelures mêlées ». Placée d'entrée de jeu sous la raison sans raison d'une biographie imaginaire, cette étude ausculte chez l'une et chez l'autre le rapport au monde, à l'amour, à la mystique ; elle insiste, plus que de raison diront certains, sur l'insatisfaction profonde de ces femmes, « mal dans leur temps, mal dans leur corps, mal dans leur âme » ; mais il est clair que l'héroïne de roman devenue plus « vraie » que nature et la sainte de chair et de sang élevée au rang de « mythe » rêvent pareillement d'une autre vie et d'actions héroïques… A lire cet essai iconoclaste et pénétrant, on comprend mieux la parenté de ces « chemins divergents mais qui convergent en elles ».