Date d'ajout : mardi 21 mars 2017
par R. de CHAMPVALLIER
REVUE : OBSERVATORE ROMANO, février 1983
Il y a un peu plus d'un siècle, le 24 mai 1971, l'Hôtel de Ville de Paris était la proie des flammes. Plus de dix années furent nécessaire· à sa reconstruction. Dans l'exposition qui vient d'y être réalisée pour en commémorer le centenaire, sainte Geneviève, dont la popularité n'a jamais subi d'éclipses dans le cœur des Parisiens, y tient une place honorable. Au nombre des témoignages présentés, le beau livre que les Éditions Beauchesne viennent de réaliser mérite d'être signalé à nos lecteurs.
Les biographes n'ont pas manqué à la Protectrice de Paris. Mais si le document principal qui sert de fondement à cette histoire a été l'objet de nombreux travaux d'érudition, il a soulevé aussi beaucoup de critiques. Était-il falsifié ?
Dom Jacques Dubois, moine bénédictin de Ste Marie de Paris, Directeur d'Études à la Section hagiographique du Moyen Age à l'École des Hautes Études, nous l'explique. Après une exposition de tout ce qui peut justifier le témoignage sur lequel il s'appuie, il reprend le texte du récit rédigé au VIe siècle, un des rares documents de cette époque et qui de ce fait a une valeur historique considérable malgré les objections qu'on lui fait. Pour rendre plus facile la lecture d'une vie "pensée et écrite dans un milieu si éloigné du nôtre", il ne s'oblige pas à nous donner une traduction littérale mais "sans s'attacher servilement aux phrases", il cherche à présenter les idées et les faits avec les commentaires nécessaires conservant par ailleurs l'ordre chronologique que d'autres érudits avaient également adopté .
Dès sa mort, Geneviève fut l'objet d'un culte qui ne fit que s'accroitre avec les années en dépit de l'arrêt momentané imposé à l'époque révolutionnaire. Mme Beaumont-Maillet, Conservateur à la Bibliothèque Nationale (Département des Estampes), nous en fait l'histoire dans une autre partie de ce livre. Elle nous montre les différents aspects du développement de ce culte - sanctuaires, organisation des processions, confréries, - non seulement à Paris mais, aussi en d'autres parties du territoire français et même, à une certaine époque, outre Rhin.
Une dernière partie est consacrée à sainte Geneviève dans l’art. On ne nous en fait pas la nomenclature, mais on y explique avec le complément de plusieurs illustrations, la façon dont jus qu'au cœur du XVIe siècle, sauf rares exceptions, les enlumineurs, les sculpteurs ou les verriers ont pu travailler et comment s'est formée cette iconographie traditionnelle. Sans qu'elle soit complètement supplantée, il y aura dans la suite d'autres déformations dont la plus importante et la plus tenace sera de représenter notre sainte en bergère. Au XIXe on cherchera à mettre en avant, le coté patriotique. Aujourd'hui comme on le lit dans la conclusion, l'accent est davantage mis sur le rôle de protectrice et la plus juste image est la Geneviève telle qu'elle domine Paris sur le pont de la Tournelle. On peut dire ainsi qu'elle rend toujours actuelle la devise de la cité: "Fluctuat nec mergitur"; une capitale dont l'histoire est toujours ballottée mais qui ne sera pas submergée, grâce à celle qui veille sur elle.