Date d'ajout : vendredi 08 janvier 2016
par BULLETIN CRITIQUE DU LIVRE FRAN�AIS, mai 1997
Grande figure polonaise d'intellectuel catholique, Stefan Swiezawski a poursuivi une œuvre importante sur le Moyen Âge - malgré les multiples vexations et interdits de la dictature communiste. Son œuvre majeure demeure la monumentale Histoire de la philosophie européenne au XVe siècle ; le présent ouvrage constitue l'essentiel du huitième volume où l'auteur aborde le thème de l'ecclésiologie à la fin du Moyen Age (XIVe-XVe siècle). C'est en philosophe, en philosophe de la culture - ainsi que le remarque Georges Cottier en sa préface - que S. Swiezawski étudie l'incidence des thèses ecclésiologiques sur la conception que l'on se fait de la société et de l'État. Le premier chapitre qui aborde la tragique déchirure spirituelle de la chrétienté et de l'humanité durant la période du grand schisme a l'intérêt de fournir une documentation précieuse sur le rôle culturel joué par l'Europe de l'Est (particulièrement Prague). Face au conflit entre papes et anti-papes, face à la déchirure du pouvoir spirituel et temporel de la papauté, le concile devint la condition indispensable du renouveau de l'Église (chap. III). Le « conciIiarisme […] doit être compris comme une conception ecclésiologique qui accentue le rôle créatif et irremplaçable du concile universel dans la vie de l'Église » (p. 93). Ce terme condense alors les aspirations de ces temps troublés, et a des implications sociales et politiques que l'auteur mesure judicieusement : « Le conciliarisme : une manifestation des tendances démocratiques » (chap. IV). Ces tendances cherchent à faire contrepoids au pouvoir temporel de la papauté et par conséquent à redéfinir les rapports entre Église et État. Certes, l'auteur n'ignore pas que sans sa forme extrême, le conciliarisme attribue au concile un pouvoir supérieur à celui du pape et favorise l'idée d'Église nationale. Il montre cependant que la crise de l'ecclésiologie du bas Moyen Âge a été, à long terme, plus créatrice qu'on ne le pense (p. 136), puisque le concile Vatican II est parvenu à une conception équilibrée des rapports entre primauté papale et concile.