Date d'ajout : mercredi 19 août 2015
par BULLETIN CRITIQUE DU LIVRE FRAN�AIS, mars 1998
REVUE : BULLETIN CRITIQUE DU LIVRE FRANÇAIS, mars 1998
Les études rassemblées dans cet ouvrage ont été élaborées dans le cadre des travaux de l’Association française d'histoire religieuse contemporaine, dont la rencontre annuelle avait pour thème, en 1996 : « Le coreligionnaire étranger". Fondée en 1974 à l'initiative de J-M. Mayeur et J. Gadille, elle a déjà abordé, dans une perspective pluridisciplinaire, la question des missions, des mouvements de jeunesse, des rites et des pratiques, de la guerre et de la paix. Celte fois, il s'agissait d'observer· dans le champ religieux, les relations entre le lien confessionnel et l'identité culturelle et nationale. La méthode est résolument comparatiste, à la fois du point de vue de l'espace géographique, du temps ou des domaines confessionnels. Les auteurs s'interrogent sur la représentation de l'étranger, celui qui parle une autre langue, se réfère à d'autres repères culturels, mais partage la même foi. La première démarche consiste à repérer les canaux par où passe l'information sur le coreligionnaire étranger. Dans sa contribution intitulée « La Furia Francese vue de Rome : peurs, suspicions et rejets des années 1950 ».- D. Durand insiste sur la difficulté de la recherche : les fonds romains ne sont pas accessibles, contrairement à ceux de France. Les archives diplomatiques font partie des sources fondamentales (rôle de Jacques Maritain et de Wladimir d'Ormesson), mais il est aussi une voie d'accès plus trouble, celle des dénonciateurs. « Nos pires ennemis à Rome sont les Français qui viennent à Rome avec des dossiers truqués pour dénoncer le "progressisme envahissant" » (lettre du cardinal Feltin à Georges Bidault, mars 1953). Confronter les représentations que se font les uns des autres catholiques français et suisses donne à F. Python l'occasion de mettre en lumière le rôle des aléas historiques. Ainsi, Fribourg, devenu lieu de refuge pour les ordres et congrégations exclus de France au début du XXe siècle, conserve du catholicisme français une image traditionaliste, voire maurrassienne, terreau favorable à l'implantation de Mgr Lefèbvre. Diversité et bouillonnement du luthérianisme suédois, attiré par le luthérianisme français au moins de 1850 à 1900 (Christian Chanel), échanges entre catholiques français et espagnols, spécialement catalans, soit dans la mouvance du Sillon de Marc Sangnier, soit dans celle de l'Action française (Manuel Cuenca Toribio), admiration suscitée en Allemagne, dans les années 1820-1850 par « les bataillons de vierges vouées à Dieu pour se charger de l’assistance aux pauvres et aux malades » (Ch. Maurel) : voici quelques-uns des thèmes abordés dans cet ouvrage. Malgré des contributions intéressantes, il reste décevant par rapport aux ambitions manifestées par son titre, Religions par-delà les frontières : les seules frontières dont il soit question ici sont celles de l'Europe, et les seules religions, le catholicisme et le luthérianisme, encore sont-elles examinées en des domaines restreints. Les perspectives ouvertes par l'avant-propos ne sont traitées que d'une façon limitée et l'on ne peul que souscrire à la conclusion de N.-J Chaline : « Il faudrait d'autres études pour tirer des conclusions plus fondées. »